YANCO
Le dernier des grands magiciens.
L’histoire d’un rêve magique par Sokhura, avec admiration et dévouement…
Yanco est très probablement l’un des plus grands et des plus remarquables illusionnistes français du XXème siècle, l’un des artistes des plus doués de sa génération…
Quatre
fois cité dans l’Encyclopédie Larousse
du XXème siècle, et figurant en bonne position dans Le Grand Livre Du
Cirque (Tome II - p.308) publié en 1977 et préfacé par Fédérico
Fellini, Yanco a
personnalisé son style en renouvelant le
répertoire classique et les techniques de la
magie, réactualisant alors, au début des
années 50, et avec succès, le thème et
le style du magicien hindou, du prince oriental, fort en vogue
à la fin du XIXème et au début du
XXème siècles, thème qui fut repris
ensuite par bon nombre de ses contemporains, notamment au cirque, sans
jamais atteindre la perfection qui était celle de
Yanco.
Ayant en effet choisi de pratiquer son art avant tout au cirque, les tours sont alors totalement conditionnés par la configuration du lieu et Yanco a su tirer efficacement partie de la liberté plus grande qu’offre l’espace et la superficie de la piste, notamment au niveau des mouvements et de la mise en scène. Aussi, en raison des nécessités imposées par la disposition du public, l’auditoire encerclant totalement l’artiste, avec donc une visibilité totale, presque à 360°, il a su parfaitement s’adapter à ces “ contraintes ”. Ainsi, cet artisan de talent, qui construit lui-même ses merveilleux accessoires, a élaboré ses propres tours et astuces en tirant profit au mieux des exigences d’expression du cirque qui n’ont fait qu’encourager son inventivité et ses manipulations, pour aboutir à un spectacle de magie aux dimensions démesurées, visible même depuis le dernier rang du gradin le plus éloigné, le tout selon des présentations où, décors, accessoires, costumes, musiques et lumières jouent sur des tonalités orientales flamboyantes et dépaysantes, donnant toute leur envergure, leur caractère et leur singularité à ses grandes illusions.
Magicien poète, sorti tout droit des Mille et une nuits, rutilant de pierreries, de plumes, de paillettes d’or et d’étoffes précieuses, s’il y a un adjectif qui qualifie Yanco, sans aucun doute il ne peut s’agir que de “ perfectionniste ”. Perfectionniste, en effet, sa principale qualité et sans doute aussi son principal défaut… Perfectionniste à l’extrême, peut-être une obsession ? presque un devoir ? il n’y a qu’à regarder ce qui est sorti de ses mains, ou alors tout simplement l’amour du travail bien fait, ce qui se rapproche beaucoup du perfectionnisme finalement , puisque tout devait avoir l’air sorti d’un palais des rêves. Jamais satisfait sans doute, Yanco pousse toujours plus loin les limites de cette perfection, du détail, mettant entièrement son temps au service de son personnage, l’Artiste, le Prince Magicien qu’il met en scène, mais aussi l’Artisan, celui qui fabrique sans arrêt costumes et accessoires, sans relâche, comme pour rattraper le temps…
Il
prend très certainement d’ailleurs autant de
plaisir à fabriquer ses costumes, compliqués et
splendides s’il en est, ainsi que son
matériel, lui aussi poussé à
l’extrême des frontières de
l’esthétique, qu’à
présenter ensuite ce travail sur piste ou sur
scène.
Parmi les numéros et les tours qui ont fait la réputation internationale de ce maître illusionniste à grand spectacle (illusions que j’essaierai de décrire avec le plus de détails possible au fil de ces lignes), il y a le sarcophage de feu (la crémation), la femme fleur, l’évasion du totem, le foulard éternel, la suspension cataleptique, le seau aux trésors, la tête fluidique, le translucube (la pagode), le cube aux fleurs, le démantibulateur (la miss-made), la femme coupée en deux, l'homme volcan (le coton et la fumée), la guillotine hindoue, le cube d’Ali Baba et son explosion de soie, le grand foulard, et encore beaucoup d’autres.
J’imagine que celles et ceux qui ont vu Yanco, comme moi, ne serait-ce qu’une seule fois, s’en souviennent encore, s’en souviendront peut-être toute leur vie, fascinés alors et toujours par le charisme et la présence du personnage, subjugués par l’explosion d’un bouquet de roses…en papier, émus par la grâce fragile d’une fleur de plumes, enthousiasmés par la soudaine apparition d’un océan de soie aux chatoyantes couleurs. Souvent copié, jamais égalé, Yanco était unique, il n’y en aura plus, et c’est un peu comme si cette manière de faire de la magie avait quelque part disparue avec lui. Il faut donc garder précieusement le souvenir de son œuvre qui est le témoignage singulier d’une époque et surtout d’une façon de faire du spectacle, totalement, au sens le plus sincère et le noble du terme : faire rêver ses contemporains, les transporter ailleurs…le plus beau métier du monde à coup sûr.
C’est donc au cirque que j’ai découvert Yanco. Passionné et fasciné par le cirque et par l’univers de l’Orient au sens large depuis que je suis gamin, si je suis devenu et suis resté un bricoleur de tissus, de paillettes, de bois, de peinture, de plumes, etc., c’est en partie grâce à Yanco. Puis si j’ai été attiré par la magie, si je m’y suis intéressé au point de me mettre à fabriquer très tôt des costumes et des tours moi-même et de me produire en public à l’occasion (car je n’en ai pas fait mon métier), c’est totalement à Yanco que je le dois, il est à l’origine de ce déclic. Yanco que pourtant je n’ai vu que deux fois en piste au début des années 80 chez Achille Zavatta, deux fois et c’est tout…
Je lui ai écrit tardivement -mais je ne me doutais pas alors que ça l’était- toute mon admiration et il m’a très rapidement et très gentiment répondu.
Je n’ai malheureusement pas eu la chance de le rencontrer, j’en garderai toujours le regret.
Yanco est toujours là dans un coin de ma mémoire, peut-être est-il perché sur une étoile, où mieux encore, sur un tapis volant ! Il fait partie de mon univers, de mon imaginaire, de mes références, de ma sensibilité artistique, et de toute cette douce nostalgie qu’il me reste de mon enfance. Celle qui ne m’a jamais quittée, car je ne crois pas non plus avoir vraiment grandi au fond de moi ou du moins avoir perdu mon âme d’enfant. Yanco est une de ces très rares personnes qui m’ont permis et de rêver et de m’émerveiller et d’être passionné.
Merci Jean, 1001 fois merci…
L’histoire d’un rêve magique.
Jean-Louis Conte, dit Yanco, est né à Toulouse le 4 décembre 1928 et y passe son enfance et son adolescence. C’est là qu’il va commencer à fabriquer des tours de magie et des costumes. Attiré par le théâtre, le cinéma et le cirque, à cette époque il passe des heures entières dans les ateliers et la boutique de Pascal, costumier et décorateur pour le théâtre du Capitole à Toulouse. Il n'est pas encore magicien professionnel mais clerc de notaire d'abord, puis clerc d'huissier avant de devenir un temps marchand ambulant. Il commence très tôt à donner quelques représentations aux alentours de la ville rose en compagnie de son copain Max Ersan devenu lui aussi magicien professionnel par la suite, se produisant à ce moment là sous le nom de Janco (contraction de ses prénom et nom), se transformant quelques années plus tard en Yanco.
Passionné
de cinéma, il devient très vite, durant cette période au sortir
de la Seconde Guerre Mondiale, à la fin des années 40, projectionniste
et animateur de cinéma itinérant, amenant le 7ème Art
dans les villages autour de Toulouse et dans une partie du Sud-Ouest.
Le cinéma restera toute sa vie l’une des ses grandes passions: féru
d'histoire du cinéma depuis les débuts du muet, d'anecdotes sur les
tournages des films, grand amateur des Laurel et Hardi, de Buster
Keaton par exemple, mais aussi
des productions américaines de la RKO Pictutres parmi lesquelles le premier "King Kong", celui tournée en 1933, "Citizen Kane", “ Le
voleur de Bagdad ” qui arrivent sur les écrans des cinémas français en 1946, puis celles de la Columbia dans les années 50, comme la série des premiers
“ Sinbad ”, ce n’est pas un hasard... En
1950 et 1951 il effectue son service militaire ; c’est
l’occasion pour lui de donner plusieurs
représentations dans la caserne où il est
affecté. En 1952 et 1953 il est engagé comme
magicien au théâtre toulousain "La Halle aux
grains" sous le nom de
Janco qu'il transforme alors en Yanco. Il continue un temps, en parallèle, son
métier de projectionniste.
En ce
début des années 50, il rencontre
l’illusionniste Alrex qui l’initie à
certains tours, dont celui du coton et du feu, appelé également l'homme volcan, un tour qu’il
présentera tout à long de sa carrière,
illusion très impressionnante : Yanco se
saisi de morceaux de coton disposés dans un grand saladier de
cuivre posé sur un guéridon puis se met
à les manger ; il se
désaltère au moyen d’un calice puis se
remet à dévorer à nouveau du coton et
soudain il fait jaillir de sa bouche une épaisse
fumée blanche, tout en continuant ce repas pour le moins
inédit ; de la fumée encore et encore,
puis des étincelles, et encore du coton et puis subitement il fait sortir
de sa bouche un interminable ruban blanc à la grande
stupéfaction du public ! C’est lui qui
offre la meilleure présentation et technique de ce tour, un
effet laissant toujours le spectateur estomaqué
dès cette première illusion !
Yanco, magicien depuis 1947, va choisir en 1954 le cirque comme lieu d’expression et d’exercice privilégié. Il a alors 26 ans…
Nous
sommes en 1954 et, après un passage de plusieurs mois au
cabaret toulousain "La Halle aux
grains" où il a mis au point, rôdé nombre de ses illusions, et fait
ses débuts en tant que magicien professionnel, Yanco est engagé au Cirque
d’Hiver -Cirque Médrano- de Paris. Et c'est cette
même année 1954 qu' il est l’unique lauréat
représentant la France aux six mois des “
Amitiés françaises ” et qu'il participe à ce titre participe
à des spectacles pour enfants au Grand Duché de
Luxembourg.
De là, il enchaînera les tournées sans discontinuer au sein de nombreux cirques européens pendant près de 20 ans.
Son premier grand engagement c’est en 1955 qu’il l’obtient. Il devient le pensionnaire pour 3 saisons du Stop Circus dirigé par Mr Gabriel Prin. Il y reste jusqu’en 1957. Son numéro est déjà haut en couleurs : apparition de foulards de soie dans des coupes montrées vides ou des quêteuses, éclosion de bouquets de fleurs dans des cornets en papier, des casseroles enflammées, l’illusion du tapis enchanté, un carré de velours matelassé montré recto verso d’où jaillissent fleurs et foulards multicolores, le jeu des rubans qui, montrés d’abord séparément puis roulés en boule, s’assemblent en un long foulard, la malle des Indes, les anneaux chinois qui s’imbriquent et se séparent à vue et le coton, déjà. Il réalise et conçoit également les costumes de la troupe pour ses numéros (il intervient en effet deux fois, en première et deuxième partie de spectacle) et pour les parades, comme souvent d’ailleurs par la suite… En effet, les directeurs de cirque ont régulièrement fait appel à ses talents de couturier et de décorateur, et en ont parfois profité pour lui confier la réalisation de costumes et de décors…
C’est à
cette époque du Stop Circus qu’il
présenta à Toulouse dans un
théâtre-cabaret à
l’occasion des arbres de Noël (en 1956) sa
première grande illusion , celle de l’homme
invisible, utilisant le principe de la lumière noire : sur
scène un homme habillé comme le
célèbre personnage du roman de Wells est
présenté dans une cabine et ôte peu
à peu ses vêtements lui donnant apparence
humaine pour finalement disparaître
complètement et devenir invisible. Durant cette
période, il apprend également avec une vieille
dame, très probablement costumière ou ancienne
costumière, la technique du crochetage au point de
Lunéville pour coudre les paillettes de ses costumes,
technique et art dans lesquels il excelle tout au long de sa
carrière car Yanco a toujours
fabriqué lui-même ses costumes de
scène, ainsi que ses accessoires…
Immédiatement
derrière, l’aventure se poursuit pendant presque 2
ans, en 1958 et une partie de l’année 1959 au
Cirque National devenu ensuite Cirque Continental dirigé par
Mr Henry Beautour (et son épouse Germaine, “
Madame Beautour ”, à qui il ne manque jamais
ensuite, lors des tournées en Bretagne, de rendre visite
à Lannion, où la famille Beautour s’est
alors installée au début des années
80). C’est chez les Beautour qu’il perfectionne son
numéro : ses tours et leur présentation. Tous les
ingrédients sont déjà
réunis : rigueur, esthétisme,
dépaysement. Il confectionne encore des costumes
pour la parade des artistes et des décors pour le cirque,
réalisant notamment des moulures et décorations
en trompe-l’œil sur les baffles du camion
publicitaire et celles du chapiteau, servant pour l’orchestre
, ayant été vraisemblablement initié
aux techniques de décoration théâtrale
sur Toulouse chez Pascal, et les ayant accommodées
à son style pour décorer son matériel.
Il commence aussi à transformer son numéro en
véritable tableau oriental – Madame Beautour
m’en a longuement parlé – costumant la
troupe aux couleurs de l’Orient, avec comme prologue
à son apparition en piste, une danse du ventre
exécutée par les “ filles du cirque
”, costumées en Shéhérazade.
C’est au cours de la tournée 1959
qu’il présenta pour la première fois le
cube d’Ali-Baba (appelée également
boite du Sphinx) et l’apparition de son fameux grand foulard,
véritable océan de soie multicolore de 25
mètres carrés, inondant totalement la piste et
enflant progressivement pour finir en gigantesque champignon
aux couleurs de l’arc-en-ciel, s’élevant
jusqu’au sommet du chapiteau… Tout simplement
superbe.
Cette boite du Sphinx (c’est le nom d'origine que Yanco à donné à ce tour) est un cube monté sur pieds dont les 4 côtés et le couvercle se rabattent pour laisser apparaître un 2ème cube qui est lui même montré au public de tous les côtés afin qu’il puisse constater que celui-ci est absolument vide, puis le tout est remis en place par Yanco qui procède alors à une très importante production de foulards et rubans de soies multicolores avant d’en sortir ce fameux grand foulard couvrant la totalité de la piste . Ce voile immense est tenu à chacune de ses extrémités par Yanco et 3 sujets qui le font s’élever dans les airs lui donnant ainsi sa forme de champignon atomique mais aux couleurs de l’arc-en-ciel, effet très visuel qui impressionne l’auditoire, il n’y a qu’a écouter les « woooh ! » des spectateurs sous le chapiteau chez Achille Zavatta, je m’en souviens très bien. C'est dans le film de Jean Loubignac " Ah les belles bacchantes ! ", sorti en 1954, que Yanco voit ce grand foulard qui est présenté comme l'allégorie du "vent" dans l'enchaînement d'une danse serpentine donnée par le ballet du cabaret où se déroule l'intrigue du film; il décide de l'inclure dans son numéro comme charge à sa boîte du " Sphinx " en 1959 (après avoir demandé son autorisation à la créatrice de ce grand voile).
De septembre 1959 à
1963 il sillonne la France au sein du Cirque des Frères
Francki, 3 saisons sous le nom de Yanco, une
4ème , en 1962 où il est “Le Prince de
Bagdad, l’insondable maître du mystère
” et enfin une 5ème et ultime sous le pseudonyme
d’Yvan Zaroff, saison au cours de laquelle son
numéro prend des tonalités plutôt
russes, mais sans jamais délaisser le perfectionnisme et
l’esthétisme qui lui sont
caractéristiques.
Son numéro prend
chez les Francki une ampleur encore supplémentaire devenant
un véritable spectacle dans le spectacle lui-même,
une revue magique. C’est chez Francki que les très
grandes illusions apparaissent, les machines compliquées,
volumineuses, rutilantes : les cages, les pagodes et les
malles à apparition, les coffres à disparition,
toujours la boite dite “ du Sphinx ” et son grand
foulard, mais aussi l’évasion du totem
(appelé à tort pilori) qui consiste en
une évasion à vue d'un sujet attaché
par 5 liens à un poteau. Yanco muni
d’un pistolet tire en l’air et, au coup de feu, les
liens tombent d’un seul coup et le sujet est
libéré, un effet très saisissant.
Il fait frissonner le public avec la guillotine hindoue, un appareil dont Yanco fait vérifier par l’auditoire que la lame de celui-ci est bien tranchante et le traverse de haut en bas avant qu’un sujet ne glisse sa tête dans la gangue de la machine de supplice… brusquement le couperet tombe mais traverse la nuque du « condamné » sans lui trancher le cou ! Ce numéro à la fois émotionnant et comique est parfois présenté dans une version amusante avec le concours d’un spectateur désigné par Yanco.
Il y présente aussi la suspension cataleptique sur le coude : le sujet prend place sur un petit tabouret placé sur une plate-forme où est fixée une tige de bambou sur laquelle il s’accoude et s’assoupit ; le tabouret servant de marchepieds est alors retiré, laissant le sujet en suspension. Celui-ci est ensuite placé à l’horizontal, suspendu uniquement par le coude et passé au travers d’un cerceau témoin qu’aucun câble ne le tire vers le haut. Enfin il reprend sa position sur le tabouret avant de reprendre ses esprits et de regagner la terre ferme. Yanco en présente une autre variante : le sujet est placé sur 3 sabres, deux sont retirés par Yanco et son assistant se retrouve alors en catalepsie sur un seul des trois sabres, retenu uniquement par la nuque (cette machine figure désormais dans la collection d’Alain Frère).
Puis il surprend avec l’illusion de la tête fluidique : un sujet glisse sa tête dans une boite cubique dans laquelle sont enfoncés 5 poignards massifs par le dessus ; le couvercle avant du cube est rabattu laissant apparaître les 5 poignards à l’intérieur, alors que la tête du sujet à complètement disparue. La boite refermée, les poignards retirés, le sujet réapparaît la tête sur les épaules !
Toutes ces grandes illusions sont ponctuées par des tours de magie générale comme par exemple les anneaux chinois, qui s’assemblent et se désassemblent, anneaux que Yanco présente dans des dimensions gigantesques, mais aussi et toujours le plus singulier et remarquable de ses tours, celui qu’il présentera tout au long de sa carrière, un peu comme une signature : l’entrée du coton et du feu (l'homme volcan), toujours impressionnante et parfaitement maîtrisée par le maître.
C’est à
l’occasion de ces tournées chez les Francki que Yanco entame
une longue collaboration avec l’un de ses plus efficaces et
fidèles partenaires de piste, associé et
régisseur à la fois, pendant plus de 10 ans:
Maurice Logier. Dès lors le Prince s’entoure
d’une véritable cour d’aides et de
sujets. Pas moins d’une dizaine de personnes entourent Yanco sur
piste, des danseuses aux assistants, des assistants aux danseuses, en
somme une véritable féerie qui s’empare
du rond de sciure et dont beaucoup, parmi les jeunes spectateurs de
l’époque, et passionnés de cirque, se
souviennent encore d’ailleurs aujourd’hui.
C’est durant ces tournées qu’il passe
pour la première fois à la
télévision française pour assurer la
promotion du spectacle Francki, d’abord dans
l’émission Paris Club en 1961, où il
présente le coton, puis dans Midi magazine
l’année suivante.
En décembre 1964, Yanco se produit à Paris pour les galas “ de Noël ” sur la piste de l'ancien Cirque Médrano réouvert depuis 1963 sous l'enseigne Cirque de Montmartre et dirigé alors par Joseph Bouglione. L’affiche du spectacle de la saison Bouglione d’alors est effectivement très orientale puisqu'elle reprend le visuel d'une des affiches réalisée dans les années 30 pour la « La Perle du Bengale » et qui n'avait pas été utlisée alors.
Entre 1965 à 1968, Yanco s’exile pour quatre saisons de l’autre côté des Alpes.
D’abord, entre 1965 et 1967 comme pensionnaire au Cirque National italien Darix Togni. Toujours accompagné en piste de Maurice Logier, et de son épouse Liliane, rencontrée précisément au Circo Togni, Yanco émerveille les foules italiennes. Ses costumes sont de plus en plus travaillés, chargés, rutilants de paillettes et de pierreries. L’escalade dans le scintillement, la complexité et la beauté des costumes comme du matériel atteint déjà indiscutablement des sommets... Effectivement, Yanco fabrique tout lui-même, costumes et accessoires. Ces derniers sont alors de plus en plus travaillés, acquièrent une dimension supplémentaire dans le détail et l’esthétique : il y a un style Yanco, reconnaissable immédiatement, unique. Tout semble encore davantage être sorti d’un palais des rêves, d’un palais des 1001 Nuits. Il participe, au cours de ces tournées chez les Togni, à des émissions pour la télévision italienne, notamment pour la RAI.
C’est à la
fin de cette même année 1968 que
l’aventure continue au Japon, pour une tournée de
onze mois, se poursuivant sur l’année 1969, au
sein de l’équipe de magiciens et de visuels de The
greatest magic show in the world. Il y travaille aux
côtés de l’illusionniste
Méphisto, de Omar Pacha, ou encore du fakir Ben Ghou Bey. La
revue est également composée du ballet des
Elysée Girls et de nombreux acrobates. L’artiste
en gardera un souvenir merveilleux et de nombreux films
tournés par lui-même avec sa caméra.
Cette tournée est annoncée alors à
grand renfort d’émissions à la
télévision japonaise, et un show sera
même retransmis sur une chaîne de Tokyo.
Fin 1969, de retour dans
l’hexagone, Yanco se prépare
à entamer l’année suivante, en 1970,
une première tournée avec Le grand cirque de
France : Amar. Deux autres suivront dans la foulée,
jusqu’en 1972, au sein de ce prestigieux
établissement où il côtoie des artistes
qu’il aura l’occasion de retrouver ensuite,
notamment chez Achille Zavatta en 1982 et 1983-84 : la contorsionniste
Fatima Zohra, l’un des meilleurs numéro dans cette
discipline, Alfred Beautour et ses panthères ou encore la
troupe de jeu chinois Chy Bao Guy, et des artistes parmi les plus
illustres et marquants du XXème siècle, comme Myr
et Myroska, et même le magicien Alpha, un
toulousain lui aussi, débutant alors et étant
venu tenter sa chance sur la tournée au concours de magie
organisé en première partie de spectacle par le
cirque Amar.
Le numéro de Yanco,
déjà époustouflant et
délirant de somptuosité,
s’est encore amélioré et embelli, comme
si cela était possible... C’est là
qu’il va créer puis perfectionner ses grandes
illusions parmi les plus fameuses, et sans doute parmi ses favorites:
toujours le grand foulard bien sûr, mais aussi le sujet
coupé en deux : un sujet placé dans un
coffre rectangulaire horizontal est scié en deux parties au
moyen d’une égoïne et ces deux parties
sont ensuite séparées, d’un
côté le tronc, la tête et les bras, de
l’autre le bassin et les jambes, le tout étant
toujours bien vivant, en mouvement ; les 2 parties
dissociées sont ensuite rassemblées et le sujet
ressort de cette machine infernale intact et en un seul
morceau !
Lors de la tournée 1970 chez Amar, Yanco crée sa version de la crémation (le sarcophage de feu) une illusion très impressionnante au cours de laquelle un sujet est invité à s’allonger sur une plate-forme, recouverte elle-même d’un coffre dont l’avant se rabat afin de montrer aux spectateurs que le sujet se trouve bien à l’intérieur ; une fois refermé l’avant, Yanco se munie d’une torche enflammée puis, en passant par le sommet du coffre y mets le feu à l’intérieur, avant que deux assistants ne soulèvent ce dernier laissant apparaître le squelette en flamme du pauvre sujet immolé et , alors que ses « restes » fumant sont ramenés en coulisses, simultanément le sujet réapparaît intact au milieu du public au sommet d’un gradin, puis rejoint Yanco sur la piste.
En 1971, toujours chez Amar, Yanco créé sa version de la miss made (-girl) à qui il donne le nom de démantibulateur, une illusion qui consiste à démantibuler en quatre morceaux un sujet placé dans un coffre vertical formé de quatre cubes, qui, séparés par des lames et posés au sol, sont remontés les uns sur les autres mais dans le désordre ; les panneaux avant sont alors ouverts et le public peut constater que les morceaux du corps du sujet sont mélangés puisque la tête a pris la place des cuisses et vice versa, et qu’il est bel et bien toujours vivant car il bouge ses pieds, ses mains et sourit ! Le tout est ensuite remis dans l’ordre et le sujet ressort la tête et les jambes à leur place respective !
Enfin la fameuse femme fleur (création de 1970 aussi), une fleur à visage humain (celui de Liliane Logier dans sa version d’origine), un entresort des baraques foraines du XIXème siècle que Yanco transpose pour la première fois sur une piste de cirque. Du jamais vu, du grand spectacle. Dans un coffre de forme pyramidale repose la tête d’une femme sans corps installée sur une couronne de fleurs ; cette illusion, à l’origine fixe (dans ses nombreuses variantes : la femme araignée, la femme sans corps) est pour la première fois donc rendue mobile par Yanco qui la présente sur une piste de cirque, dans la succession de ses illusions. La boîte est amenée fermée au centre de la piste, dans la pénombre, laissant deviné, à la jonction des deux battants et au niveau des charnières des portes, une luminosité, comme s’il y avait le feu à l’intérieur de l’écrin… Un texte d’accompagnement annonce le phénomène et puis les assistants de Yanco en ouvrent les portes, faisant apparaître la tête sans corps en pleine lumière. Ensuite, le maître, ou Monsieur Loyal, questionne brièvement cette plante humaine pour qu’elle témoigne de son état vivant. Yanco va perfectionner cette illusion dans les années qui suivent, ayant fabriqué en tout 4 exemplaires de cette femme fleur, y apportant à chaque fois des améliorations et techniques et esthétiques…
Il conçoit également les parades finales des spectacles Amar, utilisant notamment les effets de la lumière noire et de la phosphorescence. Télé Luxembourg et Télé Monté-Carlo, entre autres, invitent alors Yanco en plateau pour y présenter une partie de son numéro.
En 1973, départ pour une tournée en Grèce avec le Cirque Médrano (ex-Circo Espana de Madrid, rebaptisé pour l’occasion). Anecdote amusante concernant cette tournée : le programme papier du spectacle présente une photo du numéro de Yanco, mais sur la photo, ce n’est pas Yanco qui apparaît manipulant la caisse du sujet coupé en deux, mais son collaborateur… Maurice Logier !
Cette tournée est la dernière effectuée avec ce dernier et son épouse, et la dernière tournée de Yanco dans un cirque pendant 8 ans, un peu fatigué de bourlinguer de places en places et des conditions de vie et travail parfois très spartiate du cirque... C’est aussi l’année où il quitte Toulouse, la rue Bel-Air, la maison familiale, s’y rendant dès que possible puisque c’est là qu’est son atelier “ principal ” où il fabrique ses grandes illusions, pour s’installer à Paris...
En effet, en 1974, Yanco pose
ses valises dans la capitale, où il s’installe
quasi “ définitivement ” avant de
repartir sur les routes en 1981. Il habite dans un premier temps dans
le quartier de la porte de Clichy, puis en 1978 il s’installe
rue Didot dans le 14ème arrondissement. C’est
l’époque où Christian Fechner, un de
ses amis, passionné de magie, ventriloque et magicien
lui-même, relance après le départ de
Jean-Marie Rivière, l’Alcazar de Paris (le relais
sera pris ensuite par François Vicente).
Yanco
s’y produit sur scène, avec son numéro,
mais il participe aussi aux tableaux de la revue. Il confectionne
d’ailleurs bon nombre de costumes pour ce cabaret. Une
période un peu étrange pour l’artiste
qui, finalement, même s'il est plus confortable de travailler
dans un établissement fixe, hors des intempéries,
des places boueuses et, même s'il est ravi alors de
travailler à l'Alcazar, il ne peut pas vraiment
s’exprimer comme il le souhaite sur
scène… L'exigüité des lieux,
scène et coulisses, ne permet pas à Yanco de
créer « le spectacle »
dont il rêve, en perfectionniste qu'il est. Il y
présente notamment le tour de la crémation (le
sarcophage de feu), avec un coffre rénové,
re-décoré, arborant des têtes de
génies, bouches ouvertes, d’ou jailli de la
fumée, ajoutant un effet supplémentaire au
numéro déjà spectaculaire, puis une
nouvelle femme fleur, plus grande, plus belle, capitonnée de
fourrure rouge (la seconde fabriquée par
l’artiste) et quelques autres tours. Yanco trouve
le confort d'une vie sédentaire, certes, mais pourtant la
liberté du cirque et le grand espace des pistes lui manquent
à terme, terriblement, même si l'Alcazar est une
merveilleuse période dans sa vie d'artiste.
Fait marquant dans sa carrière: quelques mois après son arrivée sur Paris, Yanco se
retrouve privé de son camion, accidenté par un ami magicien qui le lui
avait emprunté... Son camion bon pour la casse et n'ayant pas racheté
d'autre véhicule, puisque n'en ayant pas alors l'utilité comme en tournée avec
un cirque, dès ce jour Yanco ne conduira plus jamais durant le reste de sa carrière, même lorsque dans les années 80 il repart sur les routes...
Parallèlement,
sur cette
période, il se produit en galas dans la région
parisienne et participe aux côtés de sa
sœur Henriette, comédienne, ensuite
professeur d’art dramatique, aux spectacles du
Grand Guignol, montés par Christian Fechner, au
Théâtre de l'Européen, au milieu des
années 70. Yanco
monte sur scène
avec la troupe et assure également toute la partie
fabrication, technique et logistique des nombreux trucages
“sanguinolants ” que nécessite ce genre
de représentation théâtrale ! C'est durant cette période de l'Alcazar
qu'il fait la connaissance de Patrice Guigue qui restera son assistant
et collaborateur attitré sur les galas qu'il effectue en région
parisienne jusqu'en 1989.
En 1975,
il fait une
apparition dans le film de Claude Zidi, "La Course à
l'échalote", aux côtés de Pierre
Richard et Jane
Birkin.
En 1977, il participe au
premier Grands Prix Magiques de Monte-Carlo et y remporte
alors le premier prix : la baguette d’or . Cette
même année, il se produit
également à la télévision
française dans l’émission de
Gérard Majax "Abracadabra" le 11/09/1977 où , vêtu d'un manteau or entièrement pailleté, il présente l'homme volcan puis la coupe aux fleurs.
Sédentarisé, on va dire, sur
Paris, il lui est
plus facile alors de travailler son matériel et aussi ses
costumes, de les perfectionner encore davantage, d’en
fabriquer plus, de faire dans l’exubérance, dans
le baroque poussé à l’extrême
et dans tout ce qu’il a d’esthétique,
d’harmonieux et de beau : la sophistication absolue : Yanco atteint
alors le sommet de son art, vraiment. Certains manteaux de
scène sont entièrement pailletés, pas
un seul morceau de tissus ne reste visible, des costumes pesant parfois
jusqu’à 15 kilos, des costumes que lui
seul pouvait porter, c’est sûr. L’aisance
avec laquelle il se déplaçait sur
scène, une fois harnaché de la sorte de la
tête aux pieds, du turban aux dessous, jusqu’aux
bottes, n’aurait jamais laisser supposer un tel poids,
transparaître une telle dépense physique aussi. Yanco
accumule des trésors dans son appartement dans un meuble
à multiples tiroirs qu’il a
spécialement fabriqué : des kilos de
paillettes, de plumes, d’étoffes
précieuses, de boutons, de clous, etc, une
quantité infinie de matières premières
au service d’un savoir faire unique, d’un sens aigu
de l’esthétique, d’une
sensibilité artistique singulière, d’un
talent inégalable dans son domaine (et toujours
inégalé), le savoir faire
d’un créateur, d’un artisan
passionné, d’un Artiste absolu.
Yanco reprend
la route en 1982, 1983 et 1984 chez Cirque Achille Zavatta, 3 saisons
où il assure, comme presque dans tous les
établissements où il s’est produit, le
final du spectacle dans une revue magique, haute en couleurs, au rythme
très enlevé, et sur une piste
sur-élevée de 1m20, donnant aussi une dimension
supplémentaire à son numéro. Cette
fois, Yanco emporte
avec lui des costumes sans doute parmi les plus
époustouflants de sa garde robe, ceux
réalisés sur Paris, tout en continuant, au cours
de ces tournées dans sa caravane à en
réaliser de nouveaux, toujours aussi inégalables
de splendeur. Même chose pour le matériel et les
accessoires…
Côté
collaborateurs et régisseurs, en 1982, c’est au
tour de Claude Brunel d’assister le maître sur piste, se faisant notamment découper en quatre
dans la miss-made, et sur les 2 saisons suivantes, c’est au
tour de Joël Rouxel de se faire couper en deux.
C’est donc chez Achille Zavatta que j’ai
découvert Yanco, à Lannion, le 11
mars 1982, et que je l’ai revu une seconde fois, le 22 mars
1984. C’est au cours de la première saison chez
Achille Zavatta qu’il conçoit puis fabrique son
cube aux fleurs, présenté en final de son
numéro, sur le thème de la paix en
1984 : il s’agit d’un coffre massif de
forme cubique monté sur un socle à roulettes,
dont la face avant s’ouvre laissant apparaître un
intérieur absolument vide, tapissé de rayures
noires et rouges et éclairé par un bougeoir
à huit flammes placé par un aide à
« l’entrée »
du coffre ; le bougeoir retiré, la porte
refermée, Yanco ouvre le couvercle de la
partie supérieure du cube, y plonge la main et en sort un
à un 5 bouquets géants de fleurs
placés sur le dessus et les côtés du
cube, transformant celui-ci en gigantesque buisson fleuri duquel jailli
à l’invitation du maître un sujet en
final apothéose.
C’est également là qu’il commence l’élaboration progressive et la fabrication de son translucube en forme de pagode, qu’il présenta notamment chez Médrano-Gibault en 1987, un appareil magnifique monté sur un plateau pivotant, entièrement recouvert de fins reliefs. Le sujet prend place dans la pagode puis la porte refermée sur lui, Yanco y enfonce des tubes, fermés à leurs extrémités, tubes de formes : carrée à la place des jambes du sujet, octogonale à la place du ventre, et cylindrique à la place des bras et de la tête. Une fois l’ensemble en place, Yanco et ses aides retirent les opercules obturant les extrémités des tubes enfoncés dans la pagode afin de montrer aux spectateurs que sont ceux-ci ne sont pas escamotés, traversent de part en part l’appareil, qu’ils sont parfaitement vides puisque l’on voit désormais à travers la boîte et donc que le sujet enfermé à l’intérieur à bel et bien disparu. Le tout est retiré et le sujet réapparaît intact et gambadant.
Il
fabrique également à cette
époque le tour du repas improvisé (appareil
qu’il a terminé en 1989 mais qu’il
n’a jamais présenté en public) qui
consiste en une table massive, sans rien dessus, qui est
recouverte d'un voile tenu par 2 sujets que Yanco retire
vivement pour faire apparaître alors un très
volumineux repas avec lampe et bouquet fleuri, le tout
disposé sur une nappe immaculée, entre autres
tours et grandes illusions, dont certaines ne seront jamais
achevée, comme une femme zig-zag d’un nouveau
genre dont il avait commencé le montage à
Toulouse (dans cette version le caisson central pivote pour sortir
complètement de son emplacement et être
posé au sol).
Sur la tournée bretonne du cirque Achille Zavatta de 1982, un petit reportage lui est consacré sur FR3 Bretagne le 06/02/1982, le montrant en piste, dans son numéro, puis crochetant et pailletant un costume dans sa caravane alors qu’un journaliste le questionne sur son métier de magicien-artisan.
D’après mes souvenirs, son numéro se compose chez Achille Zavatta des tours suivants
Zavatta 1982 : l'homme volcan (le coton, la fumée, le ruban), la coupe aux fleurs (le ruban produit par Yanco de sa
bouche à l’issue du tour du coton est
placé dans une coupe vide, puis, enflammé et
recouvert d’un couvercle vide lui aussi qui, une fois
retiré, laisse apparaître une abondante gerbe de
fleurs multicolores), les plumets caméléons (une grande feuille de papier est roulée en
cylindre : Yanco y
introduit
un grand plumet violet, puis le ressort changé en plumet
jaune, lui même glissé
dans le cylindre pour ressortir noir, puis rose, puis violet
à nouveau et ce plumet
est alors placé dans un sac de tissus sans fond pour se
métamorphoser à la
sortie en gros bouquet de fleurs), le foulard à
pois (un foulard noir uni est montré de tous
côtés aux spectateurs, puis, celui-ci,
agité au milieu d’un nuage de grands confettis
immaculés envoyés dans l’air par une
fusée, se change en foulard imprimé de pois
blancs), la miss-made, le cierge-bouquet (un grand cierge
allumé est recouvert par un bambou et se transforme en un
éclair en un gigantesque bouquet de fleurs
écarlates), la boîte du Sphinx et son grand
foulard, la crémation en final.
Zavatta - Paris 82 : La femme fleur est présentée en plus des autres illusions.
Zavatta 1984 : l'homme volcan, le seau aux trésors (un cylindre en métal est montré vide, puis fermé à ses extrémités par des feuilles de papier journal retenues par des cerceaux, alors Yanco y plonge sa main pour en sortir un grand nombre de fanions en soies multicolores avant de reverser le tube au dessus d’une coupe et d’en faire jaillir un monceau de perles, de pierreries et de bijoux), l’évasion du totem, le bambou (une série de 6 foulards de couleurs différentes produits par Yanco sont glissés dans un bambou et se transforment en une interminable cascade de soie multicolores qui jaillit du tube et se déverse dans une ombrelle posée sol), le sujet coupé en deux, la boîte du Sphinx et son grand foulard, le cube aux fleurs avec le final sur la paix : Yanco sort 3 bouquets du cube et, laissant le soin à ses assistants d’en sortir les 2 autres et de les disposer sur les côtés, il déclame un petit texte où il exhorte de déposer épées et fusils et d’applaudir la paix ; c’est alors qu’immédiatement apparaît au milieu des fleurs une jeune fille vêtue de blanc, tenant dans ses mains une colombe tandis que quatre bambous placés en fond de piste explosent en gerbes de drapeaux, puis Yanco place sur la tête de l’allégorie de la paix une couronne de strass figurant le mot « pax ». Un très joli final qui remporte l’enthousiasme du public et qui, personnellement, m’a beaucoup marqué.
Après 3 années de tournée avec le cirque Achille Zavatta de retour à Paris au début de l'année 1985, dans le 14ème arrondissement, rue Didot, dans son petit appartement près de chez sa sœur Henriette, Yanco prépare les costumes du “conte musical merveilleux” auquel il doit participer sur Paris en novembre et décembre de la même année : “Il était une fois les Mille et une Nuits”, un spectacle présenté sous chapiteau. Il en signe les costumes et la mise en scène du tableau magique. Il y présente notamment la crémation, la femme fleur et le cube aux fleurs. Il se produit aussi dans de nombreux spectacles, essentiellement aux environs de Paris, alors que des établissements prestigieux comme le cirque Salômé en Allemagne ou encore Benneweiss au Danemark et même Darix Togni en Italie demandent à Yanco de repartir en tournée avec leur nouveaux spectacles alors en préparation.
Puis de retour à Paris en septembre 1986, il est engagé en octobre au cabaret « La lampe d'Aladdin », mais la santé financière de l’affaire met un terme assez rapidement à cette aventure artistique qui semblait être assez intéressante de prime abord puisque le décor de ce cabaret était inspiré d’un intérieur de palais oriental.
1986 est aussi
l’année où Yanco est
contacté par Raoul Gibault, qui envisage alors de relancer
l’enseigne Médrano avec l’accord de
Jérôme Médrano, sous le concept
d’un spectacle de cirque en salle. Raoul Gibault propose
alors au maître illusionniste de participer à
cette aventure et celui-ci, très enthousiasmé, se
met immédiatement au travail, réalisant les
costumes du final et de son numéro (photo ci-dessus: boléro d'aide réalisé pour les saisons 1987-88 chez Médrano), terminant et
améliorant ses dernières grandes illusions en
date pour que tout soit fin prêt en septembre 1987 pour la
première tournée : le cube aux fleurs
est alors enrichi de cabochons de cuivre et repeint de rayures jaunes
à l’intérieur, avec une production de
bouquets de fleurs toutes fraîches confectionnées,
des bouquets encore plus gros, encore plus beaux, et il met la touche
finale à la décoration de son translucube en
forme de pagode, un appareil énigmatique qui m’a
fort impressionné la première fois que je
l’ai vu en piste, tant par la beauté de
l’objet que par l’effet produit par cette illusion
(que je découvre alors pour la première fois chez
Médrano à Lannion en novembre 1988,
malheureusement non présentée par Yanco qui lui
se trouve alors sur Paris pour préparer les costumes de la
saison 1989, mais par une " doublure " qui le remplace sur
cette tournée).
Début 1987, Yanco est convié à participer comme invité d’honneur et en tant que tout premier lauréat (en 1977) au 10ème Festival national de la magie à Monte-Carlo. Cette même année, début mars, il entraîne pour le 4ème Gala de la Presse, Jean-Pierre Foucault et son équipe qui présentent au Théâtre de l’Empire quelques unes de ses illusions (des extraits sont alors diffusés sur A2 le 04/09/1987), comme le cube aux fleurs, le grand foulard ou encore le totem (le nouveau, fabriqué sur Paris en 1985-86). C'est aussi en février 1987 qu'il rédige le seul article qu'il a écrit de toute sa carrière pour une revue de magie, un article sur le genre mystérieux, publié dans le N° 43 de "Magicus" en mars 1987.
Tout s’enchaîne très vite et à la rentrée 1987, c’est avec le Cirque Médrano-Gibault , présentant ses spectacles en salle, que Yanco part pour la dernière fois en tournée sur la longue durée. Il y clôture le spectacle dans un final toujours haut en couleurs, avec une mise en scène très aboutie, entouré en piste d’une douzaine d’assistants très richement costumés, danseuses et acrobates. Parmi les tours présentés alors : le coton, le totem, le seau aux trésors, les blendo, le foulard à pois, le translucube, le cube aux fleurs. Il fera aussi cette même année 1987 une apparition dans le film de Jean-Jacques Benneix " Roselyne et les lions ", qui sortira l’année suivante en salles.
L’aventure Médrano se poursuit également en 1988, toujours avec le numéro de Yanco, mais sans Yanco…
En effet, préférant rester sur Paris pour usiner et préparer les costumes commandés par Raoul Gibault et les tours du nouveau spectacle Médrano de la saison 1989-90 à venir, “ Les 1001 Nuits ”, un thème qui lui est cher bien évidemment, Yanco cède donc sa place en piste à un “ sosie ”. Le matériel, les costumes sont bien ceux de Yanco, mais sans le vrai Yanco en maître de cérémonie, il manque vraiment l’essentiel, il manque l’âme du numéro…
Parallèlement, sur
Paris, Yanco ne
délaisse pas la scène pour autant, se produisant
chez Médrano dès que
l’établissement est en région
parisienne, mais également en participant à des
galas autour de Paris et en Belgique. Il présente
alors, avec son régisseur et collaborateur depuis plusieurs
années sur la capitale, Patrice Guigue, des tours de magie
générale, avec du matériel et des
accessoires moins volumineux, certes, comme souvent en gala par le
passé d’ailleurs, mais cela fonctionne
parfaitement. L’auditoire est enthousiasmé. De
toute façon, Yanco apparaît et
c’est déjà tout un spectacle !
En
1989, tout en
préparant “ Les 1001 Nuits ” pour
Médrano, il participe entre autres galas, à La
Nuit des Magiciens, un festival international se déroulant
en mars à Rouen; il fait à cette occasion une apparition sur FR3 Rouen
avec son tour de la fenêtre transpercée. En novembre 1989, aux
côtés de Gérard Majax et Michael
Vadini, entre autres magiciens, il participe à un
débat sur la magie dans l’émission de
Christophe Dechavanne " Ciel mon mardi " (sur TF1), et y
présente l'homme volcan.
“Les 1001 Nuits” de Médrano avaient déjà commencé à être jouées fin septembre, en tournée à travers la France , sans Yanco et puis dès mi-novembre à Paris, sous le chapiteau Gruss, où cette fois, Yanco est bien présent dans le spectacle et tire alors sa révérence, jusqu’au bout sur la piste, toute une vie d’artiste et aussi toute une vie d’homme, un homme qui n’avait jamais perdu, ni son cœur ni son âme d’enfant…
Un grand
remerciement à
Henriette Conte pour son aide, son soutien, sa
gentillesse, ses encouragements et son amitié…
ainsi qu’à André Conte.
De même qu'à Maurice et Liliane Logier, collaborateurs fidèles et dévoués de Yanco pendant plus de 10 ans, pour leurs anecdotes et leurs renseignements sur les tournées, de 1964 à 1974.
Merci également pour leurs témoignages - dans l’ordre chronologique des rencontres et des entretiens -, à Achille Zavatta (en 1989), Claude Brunel (en 1989), Madame Beautour (en 1992), Monsieur et Madame Mai (en 1994), Jan Madd (en 1997), Pierre Etaix (en 1998), Louis Florentin (en 1998).
Et merci enfin à ceux ayant découvert cette page depuis sa mise en ligne, qui m'ont permis d'enrichir progressivement le contenu de celle-ci...
Giovanni Lagorio (depuis 2008) , Christian De Miègeville (depuis 2008), Patrice Guigue (en 2009), Antoine Conte (en 2009).
Ü 1946 à 1952 : Premiers spectacles "à la recette" sous le nom de Janco (puis service militaire) Ü 1953 à 1954 : Halle aux Grains - Théâtre - Toulouse début de la carrière profesionnelle de YANCO le magicien... |
Ü 1954 : Cirque d’Hiver - Cirque Médrano de Paris |
Ü 1955 à 1957 : Stop Circus (dir. Gabriel Prin) |
Ü 1958 à 1959 : Cirque National devenu Cirque Continental (dir. Henry Beautour). |
Ü 1960 à 1964 : Cirque des Frères Francki |
Ü Hiver 1964 : Cirque de Montmartre (dir. Joseph Bouglione) - Galas de Noël |
Ü 1965 à 1967 : Cirque National italien - Darix Togni |
Ü 1968 : Circo Orféï (Italie) |
Ü 1968 à 1969 : The Greatest Magic Show in the World - tournée d’un an au Japon. |
Ü 1969 à 1972: Le grand cirque de France : Amar |
Ü 1973 : Cirque Médrano (Circo Espana de Madrid), tournée en Grèce. |
Ü 1974 à 1981 : Alcazar de Paris et Galas en région Parisienne. |
Ü 1982 à 1984 : Cirque Achille Zavatta. |
Ü 1985 : Il était une fois les Mille et une Nuits, conte musical merveilleux (Paris). |
Ü 1986 : Festival Georges Méliès - Tarbes |
Ü 1986 : Cirque Benneweïss (tournée au Danemark) |
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